Le Wat Phra Si Sanphet était le plus important temple du temps d’Ayutthaya puisqu’il s’agissait du temple royal, équivalent au Wat Phra Kaew à Bangkok de nos jours. Il faisait partie du complexe du palais royal, et si la partie résidentielle n’a pas survécu aux incendies de la chute d’Ayutthaya en 1767, le temple reste un témoignage de la grandeur du site le plus important du royaume.
Tout comme le temple royal actuel, c’était un temple privé à la famille royale, il n’y avait donc pas de moines qui vivaient là et le site était exclusivement utilisé pour des cérémonies royales. En revanche, si a présence d’un temple est avéré dès la fondation d’Ayutthaya comme nouvelle capitale du royaume, ce n’est qu’un siècle plus tard, au milieu de 15e siècle que la plupart des constructions seront ajoutés et que le Wat Phra Si Sanphet deviendra le temple royal.
Histoire du Wat Phra Si Sanphet
Le temple a été fondé dès 1350 par U Thong, futur premier roi d’Ayutthaya, qui sera couronné sous le nom dynastique de Ramathibodi I. Ce dernier était assez basique puisque constituée de trois structures en bois appelés Prasat, des bâtiments religieux propre au palais royal. Car avant tout, le terrain occupé servait de résidence royale. Il faudra attendre le règne de Borommatrailokkanat, un siècle plus tard, pour que le site évolue.
À partir de 1448, le roi Borommatrailokkanat décide de construire un nouveau palais sur une surface bien plus grande, juste au nord, et décide de convertir l’ancien palais royal en terre sacrée, consacrant du coup tout l’espace laissé par ce terrain royal à ce qui allait devenir le Wat Phra Si Sanphet, le temple royal.
Les premières constructions importantes sont complétées en 1492 par Ramathibodi II, fils de Borommatrailokkanat, qui fait bâtir deux chedis. Quelques années plus tard, en 1499, est ajouté le principal viharn, appelé Vihara Luang (la chapelle royale), dans le but d’accueilir une grande statue en bronze de Bouddha, commandée par le roi.
Cette imposante statue de 16 m de haut, nommée « Phra Sri Sanphetdayan« , de par ses dimensions et son aspect remarquable firent rapidement la renommée du temple, à tel point que le temple sera vite appelé Wat Phra Si Sanphet, en référence à cette statue. Le troisième chedi est quant à lui achevé en 1530 par le nouveau roi Borommaracha IV, fils de Ramathibodi II afin d’y accueillir les cendres de son prédécesseur.
De nouveau un siècle plus tard, le temple, déjà vieillissant, est rénové par le roi Prasat Thong à partir de 1629. Son fils, le roi Narai (prenant le nom dynastique de Ramathibodi III), rajoute durant la seconde moitié du 16e siècle, le bâtiment en forme de croix grecque, situé juste à l’ouest des trois principaux chedis. On pense que c’est à cette époque que les structures rectangulaires, appelées mondops, ont été ajoutés entre les chedis.
Le Wat Phra Si Sanphet regorgeait alors de statues en or, dont les finitions incluaient des diamants sur le front, les doigts et le nombril, mais aussi de nombreux trésors, pour la plupart des cadeaux reçus de royaumes puissants cherchant les faveurs du roi Narai, très ouvert aux échanges de connaissances et technologiques ainsi qu’une ouverture aux commerçant du monde entier.
En 1742, le temple est de nouveau rénové par le roi Borommakot. C’est aussi à cette époque qu’est construit le Wihan Phra Mongkhon Bophit, le temple adjacent au Wat Phra Si Sanphet, aussi détruit à la chute d’Ayutthaya, mais qui a depuis été reconstruit et est toujours actif.
Et on en arrive justement à la date fatidique, 1767, qui voit une importante invasion birmane victorieuse rentrer dans Ayutthaya. La capitale est alors impitoyablement brûlée, pillée et le temple royal ne fait pas exception. Le Wat Phra Si Sanphet a été complètement détruit, à l’exception des trois chedis que l’on peut voir aujourd’hui.
Architecture du Wat Phra Si Sanphet
Le Wat Phra Si Sanphet est aligné selon une orientation Est-ouest. Les trois grands chedis reposent sur une plateforme surélevée et prennent la forme de grandes cloches, une architecture classique de l’époque d’Ayutthaya. Tout aussi classique, on retrouvait autour de ces stupas (le terme « générique » pour ce qu’on défini comme chedis en Thaïlande, pour rappel) une galerie couverte, avec son alignement de statues de Bouddha.
Parce qu’il s’agissait de l’emplacement originel du palais royal, le Wat Phra Si Sanphet a ceci de particulier qu’il est entouré par une muraille fortifiée, on peut même voir les restes d’un poste de garde sur le coin sud-ouest de cette fortification.
Parmi les autres bâtiments notables, le Prasat Phra Narai, reconnaissable à sa forme en croix, influencé par l’architecture européenne (notamment des églises), mais aussi indo-persan comme l’attestent les arcs en ogive sur les fenêtres toujours visibles. En plus du Vihara Luang contenant le Phra Si Sanphet, deux viharns secondaires encadraient ce dernier au nord et au sud.
1- Les trois principaux chedis
L’attraction première et qui se remarque tout de suite en arrivant sur les lieux, les trois imposants chedis sont les seuls survivants de cette démonstration de force et de destruction laissé par les birmans. L’impact fut tel, que même deux siècles plus tard, certains nationalistes Thailandais sont toujours revanchard concernant cet épisode.
Comme évoqué dans le résumé de l’histoire du temple, ils n’ont pas été construits ni dès le début, ni tous en même temps. Il y eu d’abord le chedi à l’Est, et celui qui est aujourd’hui au centre, tout deux construits en 1492 par le roi Ramathibodi II, pour y contenir les cendres de son père ainsi que celle de son frère aîné, Borommaracha Thirat III, qui n’aura régné que 3 ans après la mort du paternel.
Ses propres cendres sont enterrées dans le troisième chedi, construit en 1530 par son fils et successeur royal, le roi Borommarachathirat IV. Du temps de leur splendeur, les pointes des chedis étaient recouvertes de plaques dorées (probablement en or). Les trois chedis ont été pillés par les Birmans, les endommageant également. Au début du XXe siècle, seul le chedi à l’Est, tenait encore debout.
Malgré ça, tout n’a pas disparu. C’est justement en fouillant le chedi le plus à l’Est que le département des Beaux-Arts a découvert une série de stupas miniatures, chacun en renfermant un plus petit, telles des poupées russes. L’intérieur du plus petit stupa contenait des reliques. Ces derniers sont exposés au Chao Sam Phraya National Museum. On y a également retrouvé des centaines de petites statues de Bouddha en matériaux divers (bronze, cristal, argent, plomb et en or), la plupart ont été placées au Wat Buddhaisawan (qui fait partie intégrante du Musée national de Bangkok), d’autres sont visibles dans un viharn du Wat Pho.
2- Les mondops
Il s’agit des constructions qui étaient situées entre chaque chedi. S’il n’y a aucune trace quant à l’éventuelle date de leur construction, ces bâtiments n’ont certainement pas été rajouté avant le milieu du 16e siècle, pendant le règne du roi Narai.
Par définition, un mondop est une forme de bâtiment dans l’architecture religieuse thaïlandaise traditionnelle. Au sens strict, il se réfère à un bâtiment généralement carré et fermé, avec un toit à plusieurs niveaux (pyramidal) culminant par une haute flèche pointue. Pour vous donner une meilleure idée, allez au Wat Phra Kaew à Bangkok, qui comporte aussi un mondop jouxtant un chedi doré.
L’origine du mot provient des temples hindou, qui comportent des bâtiments appelés mandapas. Généralement, ces mandapas, ou mondops donc, sont utilisés pour diverses fonctions. Mais il est difficile de connaître leur fonction exact au Wat Phra Si Sanphet tant ils ont été endommagés par la mise à sac du temple. Aujourd’hui, on ne distingue guère plus que les bases en brique, sauf le mondop le plus à l’est qui possède encore des murs…
Parmi les utilisations possibles, un mondop sert de bibliothèque pour garder des écritures saintes (appelées ho trai), et il est aussi courant d’y abriter des objets religieux, pouvant servir par conséquent de lieu de recueillement/prière.
3- Viharn Phra Si Sanphet
La pièce maîtresse du temple si l’on peut dire, cet imposant bâtiment de 50 m de long a été spécialement crée pour accueillir la principale statue commandé par le roi Ramathibodi II. Il est alors courant de nommer les statues de Bouddha importante, et celle-ci sera appelée « »Phra Sri Sanphetdayan », dont la traduction peut se définir par le saint, splendide et omniscient (sous entendu Bouddha).
La statue était de base en bronze, atteignant déjà un poids de 64 tonnes, mais elle était surtout recouverte par une couche d’or pure, cumulant un poids de 343 kilos du précieux métal. Un procédé qui prendra plus de trois ans pour compléter cette statue d’exception. Devenue le principal objet de vénération dans la chapelle royale, la réputation du temple se répandit rapidement et devint alors officiellement le Wat Phra Si Sanphet.
Pour la petite histoire, lors du pillage de la cité, les Birmans ont fait fondre le revêtement en or de la statue « Phra Sri Sanphetdayan », laissant la base en bronze gravement endommagée. Lorsque Bangkok fut fondée quelques années plus tard par le premier roi de la nouvelle dynastie des Chakri, Rama I, ce dernier récupéra les restes de la statue. Cette dernière était malheureusement trop abîmée pour être refondue et restaurée dans son état d’origine. Le noyau en bronze du « Phra Sri Sanphetdayan » fut par conséquent enchâssé dans un chedi au moment de la fondation du Wat Phra Chetupon mieux connu sous le nom de Wat Pho (si vous regardez une carte du Wat Pho, vous verrez que le chedi central parmi les trois grands alignés dans une cour, l’un deux, couvert avec des mosaïques de tuiles vertes, s’appelle le « Phra Chedi Sri Sanphetdayan »).
4- Viharns secondaires
Entourant le Viharn Phra Si Sanphet (ou Vihara Luang si vous suivez), il y avait deux viharns secondaires, chacun abritant également une importante statue de Bouddha.
Au nord, se trouvait le viharn abritant une autre statue debout, Phra Buddha Lokanat (qui se traduit par le « protecteur du monde ») tandis que le viharn au sud était celui contenant une statue assise avec un naga l’entourant, Phra Palelai. Si cette dernière a été complètement détruite lors du pillage, ce n’est pas le cas de Phra Buddha Lokanat qui a pu être récupéré et a aussi été placée au Wat Pho. Vous pouvez donc la voir dans le viharn à l’est, face au ubosot du temple.
5- Chom Thong Palace Hall
C’est le bâtiment qui se trouve juste au nord-ouest du principal viharn (celui du Phra Si Sanphet), parfois simplement appelée Sala Chom Thong, bien que le terme sala semble abusif car il reste normalement d’usage pour de plus petites structures sans murs. Pour autant, on lui attribue le terme de « palais », même s’ill ne servait pas de résidence à proprement parler mais comme il est aussi référencé sous le nom de Phra Chom Thong Tinang Throne Hall, laissant entendre qu’il s’agit d’une salle du trône, c’est un bâtiment qui accueillait probablement le roi occasionnellement.
Ce qui est sûr, c’est que le bâtiment abrita un temps des manuscrits bouddhistes, et de ce fait, était ouvert aux moines venus étudier les Tripitaka, l’enseignement bouddhiste. De plus, cette salle du palais de Chom Thong était utilisée par les hauts responsables de la hiérarchie bouddhiste comme un lieu de réunion, à partir duquel ils émettaient des décrets relatifs à des questions religieuses.
Sans pour autant y faire un lien avec la religion (de nombreuses images de Bouddha et temples ayant été détruits, malgré la religion commune entre birmans et siamois), c’est l’un des édifices les mieux préservés du Wat Phra Si Sanphet puisque ses hauts murs et ses deux rangées de piliers qui soutenaient le toit sont toujours debout. Et pour l’anecdote, c’est l’un des monuments dont vous pouvez voir une reproduction si vous allez à Muang Boran, aussi connu sous le nom de Ancient City, au sud-est de Bangkok.
6- L’Ubosot (salle d’ordination)
Étonnamment, l’enceinte du temple incluait un ubosot, ou salle d’ordination. Surprenant dans le sens où pour rappel, il n’y avait pas de moines vivant à plein temps dans cet espace réservé à la famille royale. Sa fonction est connue par la présence de huit stèles, appelée « sema », qui entourent habituellement les ubosots.
S’il ne reste pas grand chose de la structure originelle, des panneaux de porte en bois magnifiquement sculptés montrant des représentations de gardiens, ont miraculeusement survécu à la destruction de 1767. Ils sont aujourd’hui exposés au Musée national Chao Sam Phraya.
7- Prasat Phra Narai
Parce qu’il fut initié et construit sous le règne du roi Narai, cet édifice en forme de croix grecque est appelé Prasat Phra Narai. Il est inspiré par l’architecture européenne, notamment celle des églises pour sa forme, même s’il intègre des styles architecturaux Indo-Persan, comme l’atteste la forme en ogives des fenêtres.
Il faut dire que c’est l’époque la plus prospère du royaume, avec un commerce aux dimensions internationales, par l’intermédiaire notamment des colonies implantées sur les abords d’Ayutthaya (notamment japonaise, perse, portugaise, française ou encore hollandaise).
La face tournée vers les chedis accueillait une statue en position assise, dont il ne reste qu’un corps sans tête, avec la brique rouge servant de base apparente, le plâtre la recouvrant ainsi que la probable couche de dorure ayant elles disparues.
8- Ensemble de chapelles et chedis secondaires
Je termine cette page en évoquant les nombreuses chapelles, associées chacune à un chedi, une vingtaine faisant le tour de l’enceinte. Ces chedis, de taille plus modestes comparés aux trois centrales, auraient été ajouté au fur et à mesure pour y placer les cendres des membres de la famille royale.
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